Elections en RDC : "L'alternance n'est pas négociable"

Barricades dressées à Goma, lors de la manifestation de l'opposition de ce jeudi pour demander que l'élection présidentielle soit organisée dans les délais. - © FISTON MAHAMBA - AFP

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En République Démocratique du Congo, l'opposition est descendue dans la rue ce jeudi. Plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées. Dans leur viseur : le président Kabila, et selon l'opposition, sa volonté de se maintenir au pouvoir, au delà de 2016. L'élection présidentielle est prévue dans 6 mois tout juste. Mais elle risque bien d'être reportée. L'opposition dénonce une stratégie du pouvoir.

3 questions à Floribert Anzuluni, il coordonne le Front citoyen 2016, plateforme de l'opposition.

Ce flou autour de l'élection présidentielle et de son calendrier, c'est donc une stratégie du président Kabila, selon vous ?

Il est clairement établi aujourd'hui que le président Kabila et sa majorité traînent des pieds pour organiser les élections. Ils ont bloqué la CENI (La Commission Electorale Nationale Indépendante). Ils ont bloqué le gouvernement et les moyens financiers. Et avant cela, il y a eu plusieurs tentatives - dont celle de janvier 2015 qui a fait des dizaines de morts - de modifier la Constitution, modifier la loi électorale ou retarder les élections.

Aujourd'hui, nous sommes dans un dialogue national, ou dialogue "Kabila" comme nous l'appelons, qui a pour l'objectif de permettre au président Kabila de se maintenir au-delà de son délai. Tout est mis en œuvre en fait par le président Kabila et sa majorité pour se maintenir au pouvoir, c'est clair. D'ailleurs, jusqu'à aujourd'hui, il n'y a pas eu de calendrier électoral actualisé qui pourrait nous confirmer que l'élection aura lieu en novembre prochain. Le président de la CENI lui-même a déclaré que l'élection ne pourrait pas avoir lieu avant 16 à 20 mois.

Parce qu'il faut actualiser la liste électorale et que c'est compliqué d'organiser des élections dans le pays, répond la CENI...

Nous avons eu des élections en 2006 et en 2011, donc le Congo n'en est pas à sa première élection. En 2006, ce processus a pris plus ou moins 9 mois. En 2011, à peu près 6 mois. Et aujourd'hui on veut nous faire croire que ce processus de nettoyage du fichier électoral(l’actualisation de la liste électorale pour permettre aux "nouveaux majeurs" et ceux qui n’avaient pas eu l’occasion de s’enrôler de le faire, NDLR) pourrait prendre au minimum 16 mois. Ce n'est pas rationnel. Donc il y a clairement des volontés de bloquer le processus. Selon des experts de l’ONU, c’est possible de tenir le délai de l’élection avec un fichier de 2011 nettoyé. C’est une option qui peut être négociée. Mais l’alternance, elle, n’est pas négociable. Le 19 décembre 2016, il faut un nouveau président de la République.

Ceci dit, le président Kabila ne s’est pas déclaré candidat.

Il ne s'exprime pas, mais il pose et laisse poser des actes par sa majorité qui ne laissent aucun doute sur sa volonté de se maintenir au-delà du délai. Lorsque l'on parle du troisième mandat, il y a plusieurs manières d'y arriver. Vous pouvez organiser une élection à laquelle vous participez. Mais vous pouvez aussi créer un chaos, un désordre qui vous permet de rester au-delà de votre délai. Son objectif est selon nous, de mettre un gouvernement de transition en place. Il permettra soi-disant d'organiser des élections sur une période de 24 à 36 mois. Ce qui n’est pas acceptable. Les élections sont connues depuis 2011. Donc on ne peut pas arriver à la fin du mandat et nous dire que les élections ne peuvent pas avoir lieu.

A ce stade, la priorité est que les Congolais se mettent ensemble, utilisent des moyens légaux, marchent pour contraindre le président Kabila à débloquer le processus électoral et permettre à ce que l'élection soit organisée dans le strict respect du délai constitutionnel.